Que celles qui en ont assez de voir les mêmes articles partout dégainent leurs claviers et râlent un bon coup, j’ai succombé au phénomène cinématographique du moment…
Drame de David Fincher, avec Jesse Eisenberg, Justin Timberlake, Andrew Garfield (là, j’entends au moins 2 personnes penser au chat, eh bien, non, aucun rapport)
Ce film retrace la création de Facebook par Mark Zuckerberg. L’idée est née lors d’une soirée bien arrosée, à Havard en 2003. Le jeune prodigue pioche une idée par-ci, en vole une par-là et avec son génie en informatique et un certain talent pour les affaires, crée le site qui révolutionnera la communication sur internet, devenant au passage le plus jeune des milliardaires.
Pour ceux qui n’auraient pas vécu sur cette planète ces dernières années, n’auraient jamais eu un ordinateur entre les mains avant aujourd’hui et n’auraient eu aucun contact avec télévisions, radios et journaux depuis plusieurs semaines, une petite présentation de Facebook : il s’agit d’un réseau social. On s’y inscrit, on raconte sa vie à travers des photos et de courtes phrases, tous nos contacts en profitent et vice versa. Un genre de communication à l’envers : on ne parle pas avec les autres mais tout seul, avec un nombrilisme effarant, et avec un peu de chance, quelqu’un intercepte le message. Une sorte de bouteille à la mer des temps modernes, la poésie en moins. Souvent, c’est votre patron qui trouve les photos de vos soirées arrosées et ça ne booste pas franchement votre carrière. Le site propose également des minis-jeux en tous genres et tests « psychologiques » de tous accabits afin de vous occuper en toutes circonstances. Notons toutefois qu’utilisé avec précaution, c’est outil assez utile pour garder un contact vague avec un grand nombre de personnes, tenter de communiquer quand on est associable (je sens quelques regards pointer en ma direction…) ou faire passer une information rapidement. Et là, joignons le geste à la parole, pour ceux qui ne sont pas encore abonnés à ma page, c’est par là :
http://www.facebook.com/pages/Les-lectures-de-Madimado/104040586329402?ref=sgm
Facebook compte 500 000 000 d’usagers (non non, je n’ai pas mis de zéros en trop…) soit environ un être humain sur 10 (quoi que si on ne compte ni les bébés ni les vieillards, la proportion doit se trouver encore largement augmentée). Comme il est dit dans le film, il est des pays où il n’y a pas de routes mais où il y a facebook.
Il y a tout dans ce film pour faire un bon thriller : un personnage principal moyennement sympathique (voire carrément tête à claques, à chacun de voir), de la trahison en veux-tu en voilà, et bien sûr, une histoire de gros sous (de très très gros sous). Le réalisateur ne tombe pas dans les travers holliwoodiens et évite la caricature. La réalisation est efficace, les acteurs convaincants (même Timberlake, c’est dire !), la BO bonne aussi. Il n’y a rien à y redire. Personnellement, j’ai trouvé la bande-annonce peut-être meilleure que le film lui-même, en raison de la tension qui y règne, mais bien sûr, il aurait été difficile de tenir le rythme pendant 2h, et puis c’est le problème des histoires vraies, on n’en fait pas exactement ce qu’on veut. On a tellement entendu parler de ce film dans la presse qu’on connaît déjà l’histoire en arrivant mais qu’importe, c’est bien fait et on se laisse prendre au jeu.
J’ai entendu principalement 2 critiques négatives sur ce film (pour les incultes, non, une critique n’est pas forcemment négative, c’est un avis construit, ce qui est extrêment différent) :
– La première c’est qu’étant donné que le scénario est tirée d’un roman écrit d’après les dires du co-fondateur de Facebook, viré du projet assez rapidement sans un centime et revenant réclamer son dû une fois son ex-meilleur ami multi-milliardaire (quand on vous dit que cette hisoire était faite pour le cinéma, c’est pire qu’une mauvaise série B), et le jeune homme très très riche en question ayant refusé de collaborer à la réalisation du film, celui-ci est construit d’après ce qu’à bien voulu raconter un monsieur très en colère, ce qui peut nuire un peu à la réalité des faits. Certes, on ne peut rien opposer à cela. Ce film est de parti pris. Mais est-ce si dérangeant ? Une vraie biographie de Zuk… – euh, j’ai encore oublié la fin de son nom mais vous avez compris – aurait sans doute été infiniement moins cinématographique. Il aurait refusé qu’on dise du mal de lui et on se serait ennuyé à périr. Non parce que si on ne pouvait pas rire des riches, à quoi serviraient-ils donc ? Tout ça pour dire que l’argument ne tient pas. D’ailleurs personnellement je n’ai pas trouvé le méchant si méchant, juste déconnecté de la réalité – pour autant que « déconnecté » puisse qualifier l’homme qui a justement réussi à connecter une bonne partie de la planète. Et le gentil, Eduardo Saverin (dont personne ne semble décidé à retenir le nom, il n’est même pas le 1° résultat à apparaître lorqu’on tape « facebook Eduardo » sur google !), est certes plutôt posé en victime mais bon, il n’est pas tellement plus sympathique que le premier ce qui équilibre un peu les choses.
– La deuxième c’est « Les personnages sont antipathiques alors je n’ai pas pu accrocher à l’histoire. J’aime pas quand le héros est méchant. » Faut-il vraiment expliquer la limite de ce « raisonnement » (cette « réflexion », hum… cette platitude peut-être ?) ? Déjà, le héros n’a nullement besoin d’être gentil, sinon comment expliquer le succès de Dexter, « la série dont le gentil est le méchant » ? Il y en a marre de cette dictature du héros gentil, de la jolie princesse, de l’histoire qui finit bien. La vie n’est pas un énorme morceau de guimauve tout rose (pour mon plus grand bonheur !) alors pourquoi les films le seraient ? Euh, j’entends d’ici les « parce que moi quand je vais voir un film c’est pour me détendre et je veux que ce soit plus joyeux que la vraie vie » ; je n’ai rien à répondre à ça, aucune loi n’interdit de jouer à la Barbie et d’écouter Chantal Goya (malheureusement !). Ensuite, le personnage principal n’est, de mon point de vue, pas méchant. Il est terriblement humain. Ce qui contribue d’ailleurs grandement à la qualité de ce film. Cet ado génial est juste un pauvre gosse paumé qui voudrait être aimé et ne sait pas comment faire. Certes, trahir son seul ami n’était sans doute pas la chose à faire mais n’oublions pas que c’est un génie. Il ne réfléchit pas comme les autres, a son mode de pensée et sa morale propres. Comme la grande majorité des surdoués, il est seul. Personne, si brillant soit-il, ne peut comprendre ce qui se passe dans sa tête. Comme lui ne pourra sans doute jamais comprendre les autres. Un peu comme un un mac et un PC ne parlent pas le même langage (pour rester dans le thème). Vous avez déjà regardé Canal + sans décodeur ? C’est du même ordre : indécryptable. C’est un modèle unique, condamné à la solitude. Pas loin de l’autisme, la pitié en moins. Du point de vue du jeune Mark, les idées qu’il a piochées à droite à gauche pour créer son site ne constituent pas un vol dans la mesure où il les a incroyablement améliorées et en a fait quelque chose d’infiniment plus intéressant… et plus lucratif (ce qui constitue bien sûr le coeur du problème). Cet adolescent rejeté de tous et ayant du mal à communiquer a décidé de faire venir les autres à lui, faisant passer son projet avant tout le reste, devenant toujours plus seul à mesure qu’il étendait son emprise sur le monde. Un sujet intéressant, traité de manière juste, une démonstration magnifique.
Ce film est sans doute plus inquiétant que Saw VI (surtout si vous avez vu la version Knacki). On en ressort pour le moins troublé et on ne regarde ensuite plus son ordinateur de la même façon. Ce n’est peut-être pas le film du siècle mais il est extrêment bien construit, bien mené, tout y est impeccable, et on prend plaisir à le regarder, on aimerait que tous soient de cette qualité. La manière dont sont traités les personnages est brillante. Un film à voir.
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