Fratrie est une histoire simple, un road-movie. Un homme, confronté à un monde et à des frères au bord du chaos, prend la route et perd peu à peu les repères de son identité. Fratrie est un texte acéré, une implosion lente, une succession d’images et de situations faites pour bousculer le lecteur.
Ca faisait des semaines que j’arrêtais pas, alors c’est pas étonnant : au bout d’un moment c’est la surchauffe, les nerfs flambent, et l’angoisse, un matin, une angoisse comme un coup de couteau dans le ventre, m’a décomposé.
Lorsqu’une femme claque la porte et s’en va, elle emporte le monde avec elle. Adem Naït-Gacem l’apprend à ses dépens. Ne supportant pas le vide laissé par le départ de son épouse, l’instituteur abandonne ses élèves et, tel un don Quichotte des temps modernes, livré aux vents contraires de l’errance, quitte tout pour partir sur les chemins.
J’aime généralement bien les romans de cet auteur. Je n’en ai lu que 3 ou 4 mais je les ai tous appréciés, j’étais donc confiante en commençant celui-ci. Je dois avouer que c’est la première fois que j’en ressors déçue. Commençons par le point le plus positif : c’est très bien écrit. Le style est fluide et agréable, ça se lit très bien.
J’ai beaucoup moins accroché avec l’histoire. Ca ne démarrait pourtant pas si mal, cet histoire d’homme que sa femme abandonne aurait pu mener à une réflexion intéressante. Mais très rapidement le personnage principal m’est devenu particulièrement antipathique. Il y a des passages plaisants malgré tout mais ça m’a semblé laborieux de suivre cet homme qui passe son temps à se plaindre et à se morfondre sans une once de réflexion sur lui-même.
La seconde moitié est plus prenante. J’ai bien cru que finalement j’allais apprécier ce roman. On y croise de nouveaux personnages, plus touchants, l’histoire prend une autre tournure, ça semblait prometteur. Ca m’a semblé avoir plus de consistance, être plus subtil. Pourtant, la fin m’a énormément gênée. Il y a un évènement violent et je n’ai absolument pas su que penser de la manière dont c’est traité. Pourquoi ? Sur toutes les manières possibles de clore ce texte, pourquoi celle-là ? J’ai trouvé ce récit assez malsain. Parmi les textes que j’ai lu de cet auteur c’est de loin le moins réussi. Je suis ressortie de ce roman avec un profond malaise qui ne s’est pas dissipé depuis.
Vivre en société, c’est accepter l’épreuve du rapport aux autres, de tous les autres, les vertueux et les sans-scrupules. En société, nul ne peut observer la morale sans se faire violence. Il y a des ermites qui croient, en s’isolant, l’observer dans la sérénité. Ceux-là trichent avec eux-mêmes. La morale ne s’exerce que parmi les autres. Fuir ces derniers, c’est fuir ses responsabilités.
J’ignore les raisons qui vous ont jeté sur les routes, mon ami. Mais il est question de l’avenir du pays. L’Algérie vient d’accoucher par césarienne d’une nation en état de choc.
« Je vais t’appeler Aria, à cause de toutes les douleurs et de tous les amours du monde. » Téhéran, 1953. Par une nuit enneigée, Behrouz entend des pleurs monter d’une ruelle. Au pied d’un mûrier, il découvre une petite fille aux yeux bleus. Malgré la croyance populaire qui veut que les yeux clairs soient le signe du diable, il décide de la ramener chez lui, modifiant à jamais son destin et celui de l’enfant. Alors que l’Iran, pays puissant et prospère, sombre peu à peu dans les divisions sociales et religieuses, trois figures maternelles vont croiser la route d’Aria et l’accompagner dans les différentes étapes de sa vie.
Première lecture de cette rentrée littéraire, premier coup de cœur. J’ai été totalement transportée par ce roman. Je ne sais en revanche pas trop comment en parler. Il était décrit comme « le docteur Jivago iranien ». Bon je ne l’ai ni lu ni vu mais j’en ai assez entendu parler pour voir un peu le genre. Pas trop ma tasse de thé a priori, trop mélodramatique à mon goût. Mais j’étais curieuse, surtout que généralement j’aime bien la littérature iranienne et j’en lis trop peu (d’ailleurs je me suis aperçue après ma lecture que l’auteur avait en réalité grandi au Canada). Si le mélo est bien dosé ça peut avoir son charme. J’ai trouvé que ça se tentait.
Et j’ai bien fait ! Dès les premières pages j’ai beaucoup aimé. Je suis de suite rentrée dans l’histoire et j’ai décoré ce pavé de plus de 500 pages en à peine 4 jours. J’ai trouvé dans ce roman tout ce que j’espérais en commençant ma lecture : un destin tragique, un fond historique et un récit proche du conte. C’était très exactement ce dont j’avais envie à ce moment-là. Le style est plaisant, j’ai trouvé ça bien écrit et agréable à lire. Quant à l’histoire, elle est particulièrement prenante. Elle ne manque pas de rebondissements et dans la seconde moitié en particulier, l’histoire de l’Iran prend une place importante dans le récit, le rendant plus intéressant encore en lui donnant une certaine profondeur.
Si je devais reprocher quelque chose à ce texte, c’est parfois un léger manque de crédibilité. Pas que ce soit particulièrement flagrant ou gênant pour la lecture mais certaines choses m’ont parfois interpelée. Déjà, l’histoire d’Aria est assez improbable mais bon, c’est un peu la base de l’histoire, on ne s’attend pas à autre chose. Mais surtout, j’ai trouvé curieux la manière dont des personnages qui n’évoluent pas dans les mêmes sphères sont amenés à se croiser sans cesse. Ca semble assez peu crédible étant donnée la superficie de la ville et sa population (1,5 millions d’habitants en 1956, je viens de vérifier). C’est une des raisons pour lesquelles je trouve que ce roman prend parfois des allures de conte, il m’a donné le sentiment d’une forme de destinée présidant au sort des protagonistes.
J’aime beaucoup quand mes lectures m’en apprennent plus sur l’histoire où les traditions d’un pays. Je pensais que ce texte serait essentiellement axé sur le côté très romanesque de l’histoire d’Aria. Pourtant il est bien plus profond que je ne m’y attendais et fait la part belle au contexte politique de l’époque qui pourrait être considéré comme un personnage à part entière. Dans la première moitié, cet aspect est peu présent, Aria étant enfant, le texte est surtout parsemé d’informations sur les coutumes, les croyances ou le mode de vie. Alors qu’elle grandit, puis devient adulte, le contexte politique prend de plus en plus de place, avec l’émergence de la contestation puis la révolution. J’ai trouvé cet aspect très bien exploité, avec des explications claires et assez poussées sur les différents courants qui s’opposent, sans que jamais cela n’alourdisse le texte. C’est extrêmement bien amené et absolument passionnant. Un destin tragique, l’histoire d’un pays en toile de fond, le tout servi par un style maîtrisé : un sans-faute pour ce premier roman magistral.
Partout où la beauté est immense, la peur est immense aussi – peut-être celle de perdre la beauté, justement.
______________
Ce que Kamran savait avec certitude, c’était qu’une fille, probablement l’une de celles dont il ne voyait pas le visage, le tenait toujours par le cœur, agrippée à son ventricule droit, au centre de sa poitrine. Et cette pression, si chargée de tristesse, se réverbérait au fond de son ventre, elle palpitait, lancinante, et elle pleurait et gémissait dans tous les chambres d’écho de son propre corps.
2 novembre 1999. Luther Dunphy prend la route du Centre des femmes d’une petite ville de l’Ohio et tire sur le Dr Augustus Voorhees, l’un des » médecins avorteurs » de l’hôpital. De façon remarquable, Joyce Carol Oates dévoile les mécanismes qui ont mené à cet acte meurtrier et offre le portrait acéré d’une société ébranlée dans ses valeurs profondes. Entre les fœtus avortés, les médecins assassinés ou les » soldats de Dieu » condamnés à la peine capitale, qui sont les véritables martyrs ?
J’aime généralement ce qu’écrit Joyce Carol Oates et ce roman a été unanimement salué par la critique. Le sujet me parlait bien, j’avais donc hâte de le lire. Il m’a fallu un peu de temps pour me décider à m’y mettre parce que c’est quand même un sacré pavé. J’ai profité du confinement pour me lancer. Je dois dire que j’ai été assez déroutée par ce roman qui n’a pas été tout à fait le coup de cœur escompté.
Parmi les livres lus en 2020, des coups de coeur, beaucoup de livres oubliables mais aussi, quelques déceptions. Esssentiellement des nouveautés, et deux livres qui traînaient dans ma bibliothèque depuis bien longtemps. Petit résumé de ces lectures tout à fait dispensables.