Théâtre

Le cirque invisible

          L’année dernière, j’ai découvert James Thierrée dans Chocolat et j’avoue avoir été assez impressionnée par le personnage. Quand j’ai vu le nom de Thierrée à l’affiche au théâtre du Rond Point, j’ai donc sauté sur l’occasion. Bon, finalement, ce n’était pas lui mais ses parents qui occupaient la scène : Jean-Baptiste Thierrée et Victoria Chaplin (oui, oui, la fille de Charlie). Petite déception au moment de cette découverte mais j’étais tout de même très curieuse de découvrir leur univers qui d’après les quelques images que j’en avais vue me semblait très (trop ?) particulier. J’avais peur que ce ne soit trop intello et assez obscur.

Le cirque invisible
©Brigitte Enguerand

          J’avoue avoir eu quelques craintes au début du spectacle qui débute par un numéro d’illusion assez loufoque (qui ne m’a par ailleurs pas marqué). Il se trouve que je ne suis pas particulièrement une adepte de l’illusion et côté humour, sorti du cynisme, il n’y a pas grand chose qui me fait rire. Honnêtement, j’ai vu le moment où j’allais trouver le temps long, très long… Finalement, même si je ne sais pas trop par quel miracle, la magie a opéré. Et je suis totalement rentrée dans leur univers loufoque et décalé. A tel point qu’au bout de 2h de spectacle, j’en aurais bien repris une tranche moi ! On est loin du cirque traditionnel, c’est totalement hors normes.

Le cirque invisible
©Brigitte Enguerand

          Difficile de décrire le monde de ces deux là tant il est à part. C’est poétique, déjanté et très inventif. Lui, ce sont des tenues improbables, un air lunaire et un humour enfantin, le tout arrosé de quelques illusions. Elle, contorsionniste, costumière de génie et inventrice à la créativité débridée. A eux deux, ils créent un monde totalement à part qui nous émerveille un peu plus à chaque numéro. Ils ne se prennent pas au sérieux et c’est cette auto-dérision qui m’a conquise. J’ai ri de bout en bout devant ce spectacle bourré de petites ou de grandes) trouvailles. Un univers riche et créatif qui nous ramène tout droit en enfance. Absolument magique. 

Théâtre

Valjean à la Folie théâtre

          J’ai un peu honte de le dire mais je n’ai jamais lu Les Misérables. J’ai encore plus honte de l’avouer mais ce pavé en deux énormes tomes me fait quand même un peu peur. J’en connais tout de même les grandes lignes pour en avoir lu des extraits mais surtout pour avoir vu deux adaptations cinématographiques dont celle avec Gérard Depardieu. Le personnage de Jean Valjean m’a toujours fascinée. Un homme bon (ou en tout cas qui essaie de se racheter) et une force de la nature. Un héros comme on les aime. Et puis il se choisit comme nouveau nom Monsieur Madeleine, forcément ça crée des liens.

Valjean, A la folie théâtre, affiche

          Je trouvais que c’était une très bonne idée de centrer une pièce sur ce personnage haut en couleurs et qui a une vie si pleine de rebondissements. Seul en scène, le comédien nous conte l’histoire de ce grand héros littéraire comme il nous raconterait ses mémoires. Nul besoin de connaître l’oeuvre d’Hugo donc pour en profiter pleinement. J’ai trouvé la réécriture très intelligente. Les grands moments du romans sont là et on ne peine pas du tout à s’y retrouver, même si j’ai trouvé que la fin aurait mérité d’être abrégée au profit d’autres passages un peu survolés mais c’est là une simple histoire de goûts, je n’ai guère de penchants pour le sentimentalisme. La mise en scène est simple mais les efforts faits sur les accessoires, les lumières et le son m’ont séduite, ils permettent de se plonger plus encore dans l’ambiance du XIXe.

Valjean, A la folie théâtre

          L’acteur est impressionnant. Non seulement il a le physique de l’emploi mais sa voix est fascinante. C’est un réel bonheur de l’écouter durant 1h15. Il livre une prestation remarquable. Cet homme a une sacrée prestance ! J’ai été totalement emportée par son récit. Valjean nous livre au fil du récit une belle leçon de vie. Un texte intimiste, fort et touchant à la fois. Il y avait longtemps que je n’avais pas vu quelque chose qui m’ait autant convaincue et que j’aie envie de soutenir. De plus, l’acteur est tout à fait abordable et prêt à répondre aux questions après la représentation. Un petit livre est disponible avec le texte, des photos et l’explication des choix de réécriture. Je n’ai malheureusement pas encore eu le temps de le lire mais il semble très bien fait et complète parfaitement la représentation. Une pièce tout en simplicité, intelligente et riche en émotions : à voir absolument !

Valjean

D’après Victor Hugo
Adaptation : Christophe Delessart
Mise en scène : Elsa Saladin
Avec : Christophe Delessart

A la folie théâtre
6, rue de la Folie Méricourt
75011 Paris

Du 15 septembre 2016 au 19 janvier 2017, les jeudis à 19h
Plein tarif 20€
Tarif réduit 15€

A la folie théâtre

Cinéma·Divers

L’homme flottant

Comédie dramatique française d’Eric Bru avec Camille Bardery, Anne-Jacqueline Bousch, Muriel Gaudin
Anton flotte dans la piscine de Sofia depuis 5 ans. Accompagnée d’une joyeuse bande de comédiens venus tout droit du festival d’Avignon, Irina débarque, bien décidée à l’en faire sortir. Une histoire de vases communicants, d’eaux dormantes qui finissent par déborder…

L'homme flottant, affiche

Voilà un film pour le moins perturbant. A tel point que je ne sais trop qu’en dire… Je peux en tout cas vous assurer qu’il a le mérite de sortir du lot ! Il est inspiré d’Oblomov que je n’ai malheureusement jamais vu bien que j’aie réservé une place par deux fois (quand ça ne veut pas…). La pièce m’intriguait beaucoup et j’ai été très déçue de la rater. Ce film a donc été une petite consolation. Je ne connaissais pas l’histoire d’Oblomov, dont le film est librement inspiré et je dois avouer avoir été très surprise. Ici, un homme vit sur un matelas gonflable sur sa piscine. C’est euh… déroutant ! La visite de son ex accompagnée de ses amis quelque peu surpris par la découverte de ce personnage va venir troubler le rythme de la maisonnée.

L'homme flottant

Je n’ai pas toujours été très convaincue par ce film d’un point de vue technique. On est proche du théâtre, ce avec quoi j’ai toujours un peu de mal au cinéma. Ca sent le tout petit budget, avec une esthétique qui aurait mérité d’être plus travaillée. Enfin, on s’habitue. En revanche, côté cadrage, des choses assez osées sont tentées. Ce n’est pas toujours très réussi mais on sent au moins un bel enthousiasme et une envie d’essayer des choses nouvelles. Parfois ça fonctionne, parfois moins, mais au final ça donne un espèce de rythme un peu bancal au film que j’ai bien aimé et qui ne fait qu’affermir l’ambiance déjà très étrange. Les personnages m’ont été assez antipathiques mais j’ai apprécié leur évolution, la manière dont ils se dévoilent peu à peu. Le contraste entre les comédiens qui n’hésitent pas à s’imposer dans cette maison et cet homme si en retrait du monde est pour le moins intéressant et crée une sorte de flottement que j’ai beaucoup aimé.

L'homme flottant

J’ai trouvé que c’était très bien joué et s’il m’a fallu un peu de temps pour rentrer dans ce film assez particulier, j’ai finalement bien apprécié son rythme totalement à part. Le film pose quelques questions intéressantes à travers la confrontation de ces êtres que tout semble opposer et il y a quelques moments de grâce. Ca m’a donné encore plus envie – si besoin était – de découvrir la pièce d’origine. Je n’ai pas tout aimé dans ce moyen-métrage pas totalement abouti mais j’ai trouvé qu’il faisait un pari osé, tant par le sujet que dans la manière de le traiter et c’est dans l’ensemble plutôt réussi. En tout cas, ça ne risque pas de laisser indifférent. Le film ne dure que 44 min mais est présenté précédé d’un court-métrage qui change en fonction des jours. La diffusion n’est pas très large mais j’espère que quelques parisiens se déplaceront pour découvrir ce petit film pas comme les autres.

Théâtre

Le cirque Le Roux s’invite à Bobino

          L’année dernière, j’avais eu la chance d’avoir deux invitations pour du cirque à Bobino avec la compagnie Les 7 doigts de la main. C’avait été un véritable coup de foudre ! Je crois bien que c’est le plus beau spectacle de cirque qu’il m’ait été donné de voir. Simplement magnifique. Quand cette année j’ai entendu parler du cirque Le Roux, dont les membres ont justement appartenu – entre autres – à la compagnie Les 7 doigts de la main, et qui se produisent à Bobino, forcément, j’ai eu très envie de découvrir leur univers. Je m’étais un peu renseignée sur internet et les images qui j’avaient vu, avec un style rétro en noir et blanc, me faisaient terriblement envie. Je remercie donc infiniment leur attachée de presse de m’avoir donné l’occasion d’aller les voir (et de m’avoir offert une place en or !).

Cirque Le Roux, Bobino
Cirque Le Roux ©Francesca Torracchi

          L’arrivée des acrobates sur scène m’a fait forte impression. La mise en scène est très soignée, la lumière est très travaillée et les costumes réussis. Le cadre semble être en noir et blanc, on se croirait dans un vieux film américain. Il y a d’ailleurs un générique de début qui finit de nous plonger dans cette ambiance. Je m’attendais donc à en prendre plein la vue pendant un peu plus d’une heure. Malheureusement, le début m’a un peu déçue. J’ai trouvé qu’il y avait un problème de rythme. La première moitié du spectacle tient plus du théâtre que du cirque. Ca parle pas mal, ça crie, ça gesticule, tout ce que je déteste. On est dans le vaudeville surjoué, un humour potache qui me laisse de marbre (et encore, je suis gentille…). Je me suis même dit que si je n’avais pas été au beau milieu d’une rangée, je serais certainement partie. Heureusement que la musique est très bien choisie. L’humour un peu lourd tranche avec le raffinement du cadre et surtout, c’est long, très long. Les meilleures blagues sont toujours les meilleures. Il faut dire aussi que je suis très peu réceptive à ce genre d’humour, autour de moi, le public riait aux éclats, on peut donc supposer que je suis juste une fois de plus la rabat-joie de service. Côté acrobaties, ça commence doucement mais on ne peut pas dire que ça s’enchaîne avec beaucoup de fluidité. C’est dommage parce qu’elles sont belles, très bien chorégraphiées, et surtout, l’humour muet qu’ils y pratiquent fonctionne à merveille, j’aurais aimé qu’ils jouent plus cette carte-là.

Cirque Le Roux, Bobino
Cirque Le Roux ©Francesca Torracchi

          Et puis, tout change. Le décor reste le même, toujours aussi élégant (avec même une petite surprise que j’ai trouvée magnifique), mais d’un coup les acrobaties s’enchaînent, le rythme est plus soutenu et surtout, qu’est-ce que c’est beau ! On en prend plein la vue. Certaines acrobaties sont très impressionnantes. Le porteur du groupe m’a sidérée, j’ai rarement vu pareil colosse, et sa stature permet des choses assez osées. On a l’impression que rien ne peut l’ébranler, il ne tremble à peu près jamais (même si les pyramides humaines ne valent pas celles de la compagnie XY). En revanche, j’ai été scotchée par un numéro d’équilibres particulièrement poétique puis par la dynamique d’une chorégraphie à quatre où les acrobaties s’enchaînent sur un rythme effréné. Le spectacle se finit sur un numéro de mat très réussi. Si individuellement les artistes ne sont pas les meilleurs que j’ai vus dans la discipline, en groupe, ils font des merveilles. Ils signent tour à tour la descente la plus élégante qu’il m’ait été donné de voir, puis la plus impressionnante. Finalement, malgré un petit passage à vide, j’ai beaucoup aimé ce spectacle. J’ai rarement vu pareil sens de la mise en scène ! Je n’ai pas trop accroché avec l’humour de la partie plus théâtrale du début mais j’ai apprécié qu’il y ait un réel fil conducteur, qui fonctionne d’ailleurs très bien. Un spectacle très bien pensé qui manque un peu de rythme au début mais se rattrape largement sur la longueur. Des acrobaties impressionnantes dans un décor splendide : un spectacle qui malgré quelques défauts sort largement du lot. A découvrir absolument !

Cirque Le Roux Bobino affiche

Cirque Le Roux
The Elephant in the room

Bobino
14-20 rue de la Gaîté
75014 Paris

Du 28 septembre au 31 décembre 2016

De 23 à 53€ la place

Théâtre

Culture : trois sorties pas toujours convaincantes

          Voici un article qui risque de s’avérer bien bref. En raison d’une fatigue prononcé et d’un problème de cheville qui n’en finit plus, j’ai vu assez peu de spectacles dernièrement (je n’en ai pas raté tant que ça non plus cela dit). Trois spectacles vus ces dernières semaines. J’ai dû me faire violence mais j’ai réussi à m’extraire de mon canapé et à ne pas abandonner mes abonnements à leur triste sort. Pour quel résultat ? Eh bien pas terrible du tout. Il y a des jours où on ferait clairement mieux de rester chez soi. Sur trois spectacles il y en a un que j’ai aimé mais dont je me souviens finalement assez peu (pour sa défense c’est sans doute plus dû à la piètre qualité de ma mémoire qu’à celle de la chorégraphie), un où j’ai dormi quasiment de bout en bout, et enfin un que j’ai détesté. Finalement des fois il vaut mieux rester chez soi avec un bon film ! Résumé donc en quelques lignes pour les curieux, avis à prendre comme vous l’aurez compris avec des pincettes.

Ratmansky / Balanchine / Robbins / Peck, à l’Opéra Garnier

 

          Un spectacle dont je ne sais pas trop quoi dire (heureusement que j’avais pris quelques notes…), c’est fâcheux. Je sais que dans l’ensemble j’avais beaucoup aimé et pourtant je ne me souviens de rien. Il faut dire que j’ai déjà vu des ballets de Balanchine et de Robbins cette année, je finis par confondre un peu avec ma mémoire à trous. Heureusement, les images du site de l’opéra m’ont un peu rafraîchi la mémoire. On peut dire que j’ai trouvé ces quatre chorégraphies plutôt classiques, même si on va vers un peu plus de modernité quand on passe de l’une à l’autre. Le tout est assez homogène, ce que j’ai apprécié : il n’y a pas vraiment de rupture dans le spectacle et on ressent le lien et les influences entre ces chorégraphes. Côté musique, le piano est à l’honneur, pour mon plus grand bonheur avec notamment Stravinsky et Chopin. C’est très beau. Les costumes sont minimalistes, des justaucorps aux teintes neutres. On n’en perçoit que mieux la grâce des danseurs. Petite préférence tout de même pour la chorégraphie de Peck qui joue sur la symétrie et des formes plus géométriques. Bien que ce n’ait pas été le spectacle le plus marquant de l’année, j’ai apprécié l’unité et la grâce qui se dégagent de ce ballet. 

In creases - Justin peck - Opéra Garnier

La Mer, d’Edward Bond,  à la Comédie Française

 

          Je ne connaissais pas du tout cette pièce, ni même son auteur, ce qui est finalement plutôt rare pour les pièces jouées salle Richelieu (la grande salle de la Comédie Française, réputée pour son absolu classicisme). Pour une fois, j’étais très en avance à ce spectacle après une journée agréable où le soleil avait enfin pointé le bout de son nez. A peine assise – à une place plus que médiocre soit dit en passant – j’ai senti les premiers signes de fatigue s’annoncer. Ca commence assez bien, avec un gros orage et des hommes perdus en mer en pleine tempête. On s’y croirait. J’ai trouvé la mise en scène très immersive assez fascinante. Tellement hypnotisant que je me suis endormie pour me réveiller une heure après. Jamais je n’avais fait pareille sieste au théâtre ! Je me suis donc réveillée aux 2/3 de la pièce en n’ayant aucune idée de ce qu’il se passait. Le marin du début avait péri noyé et les survivants (fiancée, tante, amis) s’écharpaient lors de l’enterrement dans une scène complètement improbable où une jeune femme fait des vocalises au milieu des pleurs. Difficile de vous parler d’une pièce que je n’ai pas vu mais ça m’est apparu comme un drame burlesque, mélange des plus improbable entre une histoire triste et un traitement comique. Je ne vous dirai pas si c’est réussi ou pas mais ça m’a intrigué et j’ai beaucoup aimé le décor. Le public quant à lui semblait mitigé. En tout cas les rires ont fusé plus d’une fois. Une pièce dont je n’ai pas profité mais qui m’a semblé plutôt loufoque malgré un sujet grave. A découvrir jusqu’au 15 juin.

La mer, Edward Bond, comédie française

Maguy Marin, Les applaudissements de se mangent pas, à l’Opéra Garnier

 

          Voilà un ballet qui m’intriguait assez. C’était la première fois qu’il était joué à l’Opéra Garnier et j’avais peu d’informations, ce qui n’a fait qu’exciter ma curiosité. Quelques vidéos de portés réalisés un peu partout dans l’Opéra m’avaient donné envie d’en voir plus. Le décor est très simple mais assez joli je trouve : un rideau fait de fines bandes multicolores entoure la scène – ça m’a fait penser au rideau qu’utilisait ma grand-mère l’été pour empêcher les mouches de rentrer mais je vous assure, j’ai bien aimé, c’est même ce que j’ai préféré dans ce spectacle. Pas de costumes mais ça ne m’a pas spécialement dérangée. Les danseurs sont dans des tenues « de ville » tout ce qu’il y a de plus classique. Jusque-là, ça va encore. Pour tout le reste, c’est bien simple, je n’ai rien aimé (et ça encore, c’est la version franchement sympa). J’ai absolument détesté la chorégraphie – ou plutôt devrais-je dire l’absence de chorégraphie ? Les danseurs courent dans tous les sens et tombent comme des mouches. Il y a bien quelques portés, mais s’ils semblent assez techniques, ils ont la grâce de pyramides humaines réalisées par une classe de 6° désabusée (notons toutefois que c’est plutôt photogénique). La musique quand à elle m’a fait penser le plus souvent à un énorme ampli mal réglé (chrrr, krrrr, iiiiiii…). Que du bonheur ! J’ai passé l’heure que dure le ballet à regarder ma montre et à lancer des coups d’oeil désespérés à mes voisins. Sans aucun doute ma plus grosse déception à ce jour en terme de ballet.

Maguy Marin, Les applaudissements ne se mangent pas, opéra Garnier
© Laurent Philippe / OnP