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Pour seul cortège – Laurent Gaudé

          Le Grand Alexandre se meurt. Celui qui bataille après bataille s’est construit un empire, l’homme dont la volonté ne fléchit jamais et sème la terreur de par le monde, le meneur d’hommes craint et aimé, est à l’agonie. Mais celui dont la volonté n’a jamais flanché ne sait pas mourir, pas alors qu’il reste tant de contrées à découvrir, tant de terrer à conquérir. Mais alors que ses compagnons se déchirent déjà pour les miettes de l’empire, qui pourra l’accompagner dans ce dernier voyage ?

           On suit dans ce roman plusieurs personnages : Alexandre, Dryptéis et Ericléops. Ce dernier est le moins présent, pourtant il est le seul à parler à la première personne, ce qui lui confère une place particulière. Les pensées d’Alexandre et Dryptéis sont retranscrite à la troisième personne ; pourtant, le point de vue semble presque toujours interne (pour rappel, point de vue interne : on voit le monde par les yeux d’un personnage). Ce choix est assez surprenant et crée un étrange mélange de distance et de proximité qui rend le tout un peu vaporeux. L’écriture est très poétique. Les phrases sont souvent hachées, comme autant de bribes de pensées des personnages. Le passage constant de l’un à l’autre crée un rythme très particulier, un peu bancal, comme une course éperdue.

          Contrairement à ce qu’on pourrait croire, il ne s’agit pas d’un roman histoire. La mort d’Alexandre n’est finalement qu’un prétexte à l’écriture. Le contexte historique est évoqué dans ses grandes lignes au détour d’une phrase ou l’autre mais l’auteur ne s’arrête pas dessus. Ce sont les contradictions des hommes qui sont au coeur du récit, leur grandeur et leurs faiblesses. Très onirique, ce texte m’a parfois déroutée. J’eusse aimé quelque chose de plus terre à terre. Je ne goûte guère les incursions dans le domaine des esprits. Fort heureusement, l’incroyable beauté de l’écriture vient un peu compenser cet aspect mystique. Toutefois si ce roman possède un charme indéniable, il s’avère tout de même assez difficile. Un texte fort et poétique qui frappe par son écriture magistrale. Sans aucun doute, un des grands romans de la rentrée.

Sa respiration devient plus difficile mais il n’a pas peur. Il s’accroche à la phrase de Perdiccas comme il lui est arrivé si souvent de s’appuyer sur ses camarades dans la mêlée des combats., il s’accroche à cette phrase qui tourne en son esprit et lui donne de la force :  » Il tiendra ».

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Il est une chose qui reste solide, aussi solide que la puissance des montagnes, c’est le chant des femmes endeuillées.

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Elle sait qu’elle va devoir lutter contre ses bras qui voudront étreindre son enfant, contre sa propre bouche qui voudra l’embrasser, contre sa langue qui voudra tout dire. Il faudra se dominer et elle ne sait pas si elle sera suffisamment forte pour cela. Le regarder, et partir : quelle mère pourrait faire cela ?

4 commentaires sur “Pour seul cortège – Laurent Gaudé

  1. Justement, ce que j’aime chez Gaudé c’est l’incursion  » dans le domaine des esprits ». Et puis ce côté grandiose, sa façon de conter. J’ai beaucoup aimé ce livre

    1. J’ai beaucoup aimé aussi mais je suis un peu trop terre à terre pour que ça me touche vraiment. Par contre j’aime énormément aussi sa façon de conter et son écriture.

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