Mes lectures

La discrétion, Faïza Guène

« Ses enfants, eux, ils savent qui elle est, et ils exigent que le monde entier le sache aussi. »
Yamina est née dans un cri. À Msirda, en Algérie colonisée. À peine adolescente, elle a brandi le drapeau de la Liberté.
Quarante ans plus tard, à Aubervilliers, elle vit dans la discrétion. Pour cette mère, n’est-ce pas une autre façon de résister ?
Mais la colère, même réprimée, se transmet l’air de rien.

Un coup de cœur inattendu de cette rentrée littéraire. J’avais entendu dire du bien de ce texte et je l’ai lu par curiosité, sans en attendre grand chose. Je n’avais jamais entendu parler de Faïza Guène qui n’en est pourtant pas à son coup d’essai. Autant je suis intéressée par les textes sur l’immigration, autant les récits sur la famille et les textes introspectifs me parlent souvent moins, j’avais donc un peu peur de m’ennuyer. Grossière erreur, c’est l’un des plus beaux écrits que j’ai lu sur le sujet.

Couverture du roman La discrétion

Ce roman porte bien son nom. La discrétion, c’est ce qui caractérise Yamina, qui fait tout ce qu’elle peut pour passer inaperçue, ne pas déranger. Mais cet adjectif pourrait aussi définir le style de ce roman, qui ne fait pas dans l’esbroufe, simple mais tout en délicatesse, si juste. L’histoire aussi est discrète finalement, une famille comme tant d’autres, des tranches de vies, rien de spectaculaire, mais là encore, tant de justesse et d’humanité dans l’effacement d’une mère et la colère de ses enfants qui cherchent leur place dans la société et n’hésitent pas à s’affirmer.

Je ne suis pas concernée par l’immigration, ce dont parle l’autrice, ce n’est pas ma culture, ce sont des problèmes que je ne vis pas. Mais j’ai eu l’impression que c’était si bien décrit. C’est très parlant, j’ai trouvé que c’était un hommage magnifique à toutes ces femmes coincées entre deux cultures qui dans leur pays d’accueil sont devenues quasi invisibles. L’aspect social est également très intéressant. C’est un roman qu’il faudrait mettre entre toutes les mains pour le regard qu’il porte sur l’exil et le racisme ordinaire. Un texte doux en apparence et pourtant si fort qui avec le recul m’a marquée plus que je n’aurais pensé. Tout simplement magnifique.

Portrait de Faiza Guène

L’idée de vieillir n’effraie pas Yamina. Depuis quelques années, elle ressent même une certaine quiétude. On dirait qu’elle n’est pas embarrassée par les petits tracas de l’âge. De toute façon, Yamina ne se plaint jamais.
C’est comme si cette option lui avait été retirée à la naissance.


Yamina croit apaiser sa fille en lui répondant : C’est comme ça benti, on doit accepter, on est comme leurs invités, on est chez eux. Ça fout Hannah à bout, ce genre de discours : Non, on n’est pas chez eux maman ! On n’est pas des « invités » ! T’as reçu un carton d’invitation, toi ? Moi non ! Ça suffit, ça fait trente-cinq ans que j’entends ça ! Nous, on est chez nous ! On est nés ici ! Et si on est arrivés là, c’est pas par pure coïncidence !

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