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La Guerre et la Paix – Lev Tolstoï

        Entre 1805 et 1812, les relations entre la Russie et la France sont tendues. Les deux pays oscillent entre guerre et paix. Un calme relatif et une amitié instable entre les deux pays succèdent aux batailles sanglantes qui opposent ces empires rivaux. Entre Saint-Pétersbourg et Moscou, trois familles, les Bolkonsky, les Rostov et les Bézoukhov, sont les témoins privilégiés de cet échiquier politique, au centre de la haute société russe. Amitié, premiers amours, ambition et trahisons se côtoient quand la petite histoire rejoint la grande.

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          Il y avait longtemps que cette version allégée (par l’auteur lui-même, qui l’a épurée de ses nombreuses digressions) de ce grand classique de la littérature russe attendait dans ma bibliothèque. J’aime généralement beaucoup les auteurs slaves, même si Dostoïevski l’a toujours largement emporté dans mon coeur sur Tolstoï dont le côté moralisateur a une certaine tendance à m’agacer. Je me suis donc lancée dans cette lecture à la fois enthousiaste et un peu méfiante. J’ai eu un peu de mal à accrocher avec les premières pages, le temps de comprendre qui était qui (et croyez-moi, ça a pris du temps !), de m’habituer au style et de replonger dans ce début de 19° s. Mais assez rapidement, les caractères des personnages se dessinent. Ils sont nombreux et cette virevolte constante des sentiments et des opinions devient grisante. On retrouve toute la légèreté feinte des salons, les intrigues qui s’y nouent et les drames intimes qui y naissent.

          Le texte alterne entre les périodes de paix dans les salons pétersbourgeois ou moscovites et les périodes de guerre sur le front. Les scènes de bataille sont saisissantes, criantes de vérité. On y retrouve aussi bien les calculs alambiqués des théoriciens, les luttes internes pour le pouvoir que la peur du simple soldat. J’ai aimé cette ambiance champ de bataille avec sa désorganisation, sa peur viscérale, et la vantardise des soldats après la victoire, pour oublier leur lâcheté. Le style de Tolstoï est exigeant, il demande du temps pour se plonger dedans, mais il nous entraîne avec lui dans cet univers où l’ambition est au centre de tout. On suit avec délices aussi bien les intrigues politiques que celles de salons. Un livre qui se dévore, autant pour l’aspect historique que pour le plaisir de voir les personnages s’enfoncer dans d’improbables manigances pour parvenir à leurs fins. Une belle écriture et une psychologie soignée dans un contexte historique passionnant qui font de ce pavé une lecture aussi intéressant qu’agréable.

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Il affirmait que les vices humains n’avaient que deux sources – l’oisiveté et la superstition -, et qu’il n’y avait que deux vertus – l’action et l’esprit.

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Pourquoi pas ? Ca me coûte si peu et ça vous fera tant de plaisir.

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Pfuel était l’un de ces théoriciens qui aiment tellement leur théorie qu’ils en oublient le but : sa mise en pratique. Dans l’amour de sa théorie, il haïssait toute pratique et ne voulait pas en entendre parler. Il se réjouissait même du fiasco, car un fiasco qui provient de l’inévitable écart entre la théorie et la pratique démontrait la justesse de sa théorie.

14 commentaires sur “La Guerre et la Paix – Lev Tolstoï

  1. Il faut vraiment que je le lise celui-là, depuis le temps que je dis que je veux me remettre aux auteurs russes. Et relire ET finir enfin Anna Karénine. Et lire les Frères Karamazov, pavé qui se trouve chez mes parents, que ma mère n’a jamais réussi à finir.
    Je m’en lance des défis dans la vie, hein ?
    Blague mise à part, j’aime bien les auteurs russes, j’adorais les lire quand j’étais au lycée. Il faut vraiment que je m’y remette !

    1. Anna Karénine est plus prenant au départ mais il y a pas mal de longueurs qui tuent un peu l’histoire, par contre la fin est grandiose ! Les frères Karamazov, j’avais trouvé que c’était trop axé sur la religion mais j’adore l’écriture de Dostoïevski. J’essaie de lire au moins un pavé russe par an. Ca fait souvent un peu peur de s’y mettre mais c’est un univers tellement fascinant !

  2. Une seule lecture, mais quelle lecture !! Ce livre est dans ma PAL… mais j’avoue qu’il me fait peur !
    Pourtant, j’avais adoré Anna Karénine

    1. Pareil ! Mais là il faut dire que c’est encore le format au dessus et le sujet est moins attirant. Mais même si le style est très différent, c’est tout aussi bien !

  3. Bonjour,
    N’ayant pas lu cette version allégée de l’oeuvre, mais celle de la pleiade (la plus courante), j’ai été surpris en feuilletant la traduction de Bernard Kreise; la fin semble changer, Pétia et le prince André semble survivre au dénoument de l’histoire. Pourriez-vous m’éclaircir?
    D’avance, merci.
    Cordialement,
    T.

    1. Bonjour,
      Me voilà extrêmement surprise ! Je ne savais pas qu’ils mourraient dans la version longue. Ils survivent en effet dans cette version de l’histoire qui finit d’ailleurs finalement bien pour tout le monde. Etrange que Tolstoï ait poussé la révision de son texte jusqu’à ces extrémités, un sujet qui mériterait d’être approfondi.
      Merci pour votre message qui soulève un point des plus intéressants.
      Bonne journée,
      Madimado

      1. Tolstoi l’a réduit afin de démocratiser l’oeuvre à un public plus large; il a d’ailleurs fait plusieurs révisions de son texte. La traduction de Bernard Kreise reprend une des versions revisitées à cette fin (moins de réflexions épistémologiques sur l’élaboration de l’Histoire et des évènements de 1812, une fin moins dure,..). Néanmoins, cette version est présentée sur la quatrième de couverture comme étant l’originelle; c’est faux. La première version se rapproche de la version la plus courante, celle que l’on trouve habituellement dans toutes les éditions de poche (sauf le seuil). Je vous conseille tout de même de lire cette version là (« longue »), sans doute plus riche (certains personnages clefs de l’évolution psychologique des personnages ont été enlevés!!), ou tout au moins de regarder l’adaptation de Bondartchouk qui est très fidèle à l’oeuvre (une restitution à l’écran des « sentiments philosophiques et fantastiques », très présents chez Tolstoi comme par exemple la « chevauchée imaginaire » de Pétia avant de mourir, vraiment conforme à ce qui est écrit dans LGELP), et qui vous permettra de connaitre le dénouement de la « version longue ».

        Le film dure 6h40 (4 époque) mais quand on a le livre, c’est juste un pur plaisir.
        Cordialement,
        T.

      2. Oui, la quatrième de couverture est mensongère, cette traduction n’est pas du tout celle de la version originelle mais une révision de la version choisie par Tolstoï pour l’inclure dans un recueil de ses oeuvres. Elle a de nouveau été modifiée après d’ailleurs. Si j’ai choisi cette version quelque peu allégée c’est parce que je ne suis pas franchement une inconditionnelle de Tolstoï et particulièrement de son amour pour les développements philosophiques. J’ai donc pensé que j’accrocherais sans doute mieux à cette traduction plus « grand public ». Je pense toutefois que je lirai un jour l’édition classique histoire de comparer.

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