Drame roumain de Cristian Mungiu avec Cosmina Stratan, Cristina Flutur, Valeriu Andriuta
Alina a grandi dans un orphelinat en Roumanie et vit en Allemagne où elle fait de petits boulots. Mais elle a le mal du pays, et surtout celui de Voichita, son amie de toujours. Elle décide alors de rentrer au pays pour venir la chercher et l’amener avec elle. Si elle savait que celle-ci avait entre temps intégré un monastère, jamais elle n’aurait cru que Dieu puisse être plus fort que leur amour. Une réalité qui va la faire sombrer dans la folie…
On rarement l’occasion de voir du cinéma roumain et c’est bien dommage. Des films souvent sombres et profonds, qui loin des clichés du cinéma occidental dont ils semblent déjouer tous les codes, paraissent nous montrer des tranches de vies brutes, dans tout ce qu’elles peuvent avoir de cruel, sans sombrer dans le pathos ou le misérabilisme. Une justesse et une sobriété qui me surprennent toujours et laissent le spectateur désarmé par tant de vérité. Ici encore, ce film nous scotche littéralement au fauteuil. Je suis allé le voir sans savoir que c’était là la nouvelle merveille du réalisateur à la Palme d’Or. Une découverte qui à la sortie de la salle ne m’a en rien surprise, d’autant que ce film-ci s’est vu attribuer un double prix d’interprétation féminine et le prix du scénario à Cannes. En plus des qualités certaines de la création roumaine, cette langue me fascine littéralement et l’entendre est une source de joie inépuisable quoique trop rare.
Ce film au sujet difficile est extrêmement sombre. Dépouillé dans sa forme, il ne met que mieux en valeur le tragique de l’histoire. Je me suis d’ailleurs rendue compte à cette occasion de combien l’absence de musique pouvait être autrement plus efficace que l’habituel abus de violons. L’amour entre ces deux femmes est traité avec une grande pudeur qui lui donne une force incroyable. D’ailleurs, s’il s’agit ici de deux femmes, la question de l’homosexualité est tout à fait anecdotique, c’est avant tout d’amour impossible et d’espoirs brisés qu’il retourne. Pourtant, peu ou pas de grands discours romantiques, c’est le désespoir le plus profond que filme le réalisateur. N’étant pas adepte de fanatisme religieux, certains passages m’ont un peu gênée par leur longueur, fort heureusement compensée par la justesse des deux actrices principales. Toutefois, malgré cette petite touche négative et une fin un peu abrupte, un film qui m’a étonnée par son réalisme cru et m’a transmis des émotions assez rares au cinéma, du doute au désespoir. Un film très sombre mais d’une beauté certaine qui prend des chemins de traverses pour traiter d’un sujet rebattu (l’amour l’amour toujours) et surprendre de bout en bout. Un cinéma abrupt mais vrai, comme on aimerait en voir plus souvent.
En regardant la bande-annonce pour la première fois, dans laquelle on retrouve en même pas deux minutes l’intensité de l’ambiance si particulière de ce film, je constate qu’il est inspiré d’une histoire vraie. Voilà qui fait froid dans le dos et donne envie d’en apprendre plus sur ce drame sordide.


Vous avez raison ce film est une merveille, la mise en scène est totalement maitrisée où chaque plan est millimétré. Ce qui fait également l’intérêt de ce film outre sa beauté formelle c’est qu’il n’y a aucun manichéisme, les religieux ne sont pas d’affreux méchants, d’ailleurs on entre aussi dans les ordres parce que c’est le moyen dans cette région pauvre d’obtenir un lit et un couvert. Le pope mène son opération d’exorcisme en toute sincérité, victime de son obscurantisme croyant sincèrement délivrer la jeune fille du malin.
Nous partageons votre enthousiasms
Tout à fait d’accord. J’ai trouvé la réalisation d’une grande finesse dans la peinture de l’âme humaine. L’histoire donne l’impression d’être filmée sans parti pris, que ce soit sur la religion ou l’homosexualité, ce qui est aussi rare qu’appréciable.