Un couple sans histoire, Laure et François Berteau. Leur fils adoptif, David, adolescent enjoué qui se pose des questions sur ses origines. Le père Georges Tellier, un prêtre qui s’arc-boute à sa foi, dans une Eglise qui s’étiole. Frédéric Nguyen, flic résolu à l’action et au silence, pour préserver sa vie privée. Hicham, que le goût du risque et de la frime finit par conduire en prison. Des remarques blessantes, de mauvaises rencontres. Une emprise croissante de l’islamisme et une colère de plus en plus radicale. Et tout se précipite. Vers cette petite église d’un village du Sud-Ouest de la France, la tragédie attire comme un aimant explosif des hommes que rien ne prédestinait à se rencontrer.
Après Un jour viendra couleur d’orange, voici un autre roman qui prend pour thème un sujet d’actualité. Tristement remise sur le tapis ces derniers jours. En effet, le récit retrace un attentat commis dans une église qui m’a semblé s’inspirer de celui commis en 2016, bien qu’il s’agisse ici purement d’une œuvre de fiction. On suit différents protagonistes : le prêtre, les deux terroristes, un des flics qui se rendra sur place…
En 1953, quand s’ouvre le roman, Maria vit depuis plus de cinquante ans seule dans la maison de famille délabrée. On la surnomme « la sorcière de Waipu », elle qui très jeune se rebella contre sa mère pour vivre sa passion avec un cantonnier. Mise au ban d’une communauté encore très respectueuse des strictes règles morales édictées par son sourcilleux fondateur – l’autoritaire et charismatique Norman McLeod, avec qui sa grand-mère Isabella quitta l’Écosse en 1817 –, elle a tout le temps de se pencher sur le passé.
Je continue ma découverte de la littérature néo-zélandaise avec ce roman qui m’intriguait. Jusqu’à présent, je n’avais lu aucune autrice de ce pays. S’il y a bien un point commun entre ce texte et les autres romans écrits sur l’île que j’ai déjà lus (Sous la terre des maoris par exemple), c’est sa violence et sa dureté. C’est âpre, sans concessions. J’ai trouvé ce texte difficile à lire, particulièrement au début. On suit trois générations de femmes et j’ai mis un peu de temps à me faire à la structure du texte mais on s’y habitue et ensuite l’histoire n’est plus si difficile à suivre. En tout cas on est clairement sur une littérature exigeante qui ne sombre pas dans la facilité et peut rebuter.
Comédie dramatique, policier irlando-britannique John Michael McDonagh avec Brendan Gleeson, Chris O’Dowd, Kelly Reilly
La vie du père James bascule le jour où il entend une confession bouleversante. Sa fille revient au même moment dans sa vie et il va commencer à voir les choses sous un nouveau jour.
La fin d’année 2014 a été riche en bonnes surprises cinématographiques parmi lesquelles Calvary. Un film pour le moins austère mais extrêmement fort. Dès les premières minutes, on entre dans le vif du sujet quand le prêtre reçoit une confession très particulière. Suite à ça, sa vie va se trouver bouleversée et il va commencer à envisager les choses sous un autre angle. Sans compter l’arrivée de sa fille après une tentative de suite qui va venir perturber ses habitudes. Difficile je trouve de parler de ce film. Impossible de parler du scénario sans en dévoiler le ressort essentiel, ce qui serait un peu dommage. La trame est très simple et tout tient sur la psychologie des personnages qui est particulièrement réussie. Si certains portraits peuvent sembler caricaturaux, j’ai trouvé qu’ils fonctionnaient à merveille, amenant souvent une touche d’humour à cet univers très sombre.
Calvary, c’est ce genre de film où il ne se passe rien et beaucoup de choses à la fois. L’intérêt du film tient surtout dans l’évolution du personnage. Un homme à la personnalité complexe qui est partagé entre ses ouailles dont il semble proche, et sa (grande) fille, qu’il délaisse. Il va peu à peu être amené à se poser des questions sur le pardon. Le doute est au centre de cette histoire poignante. Je n’ai pas toujours trouvé les cadrages très convaincants mais le récit est filmé de manière très frontale, sans concession, ce qui lui donne une certaine rudesse qui contribue à sa force. L’interprétation de Brendan Gleeson est magistrale et le reste du casting tient également bien la route. Le résultat est un genre de thriller intimiste sur fond de religion. Vraiment surprenant. Si dans l’ensemble le film est assez lent, la fin est à la hauteur du début, ce qui n’est pas peu dire. Un film dur et austère qui n’est pas dénué d’une certaine beauté.
L’abbaye de Bonneval se situe dans l’Aveyron, sur le plateau de l’Aubrac. Une trentaine de religieuses de l’ordre Cistercien de la Stricte Observance y vivent loin du monde. Pour la première fois, elles ont accepté d’être suivies par une caméra, celle de Nicolas Gayraud.
Je connaissais l’Abbaye de nom pour y être allée cet été. Les religieuses y fabriquent du chocolat qu’elles vendent à l’abbaye et dans les commerces des environs. Nous avions manqué les heures d’ouverture et j’en conservais un petit regret. Quand j’ai vu à peine quelques jours plus tard qu’un documentaire leur était consacré, je n’ai pas pu résister à l’envie d’en savoir plus. Je m’attendais à quelque chose d’assez austère, comme c’et souvent le cas dans ce type de reportage. Les réalisateurs ont également tendance lorsqu’il s’agit de religion à faire dans l’esthétique très contemplative, ce qui me fait toujours un peu peur. Pourtant, bien que j’aie vu nombre de films et documentaires se passant dans des couvents, je dois avouer avoir été assez surprise par le résultat.
Visuellement, ce film est d’une grande sobriété. Filmé caméra à l’épaule, il se compose essentiellement de déclarations ou de conversations glanées au fil de la visite du réalisateur dans l’abbaye. Il y a passé (le temps de) quelques jours et le documentaire est découpé jour par jour, ce qui permet de voir l’évolution des relations avec les religieuses, un peu réticentes au début à s’épancher. On est donc plus proche du reportage à la Strip-tease qui nous présente des images brutes et non commentées (ou presque) que du film à proprement parler. Il m’a fallu un peu de temps pour m’y faire, préférant les choses un peu plus lissées – oui oui, je l’admets tout à fait, je peux me montrer très conformiste parfois malgré mes bonnes intentions. Pourtant, j’ai fini par me faire à ce rythme particulier et cet univers qui ne l’est pas moins.
J’ai été extrêmement surprise par les discours que tenaient ces religieuses, pour le moins impertinentes. Et j’ai beaucoup ri ! Il y a des réflexions tout à fait savoureuses : une première dit qu’elle est rentrée au couvent dans les années 70 et que c’était un acte purement contestataire, une seconde avoue que tout lui manque et qu’elle rêve de chaussettes Shadoks (je ne vous dit pas ce qu’elle veut voir inscrit dessus, vous ne me croiriez pas !), une autre encore refuse d’aller faire le piquer aux Vêpres. Je m’attendais à tout sauf à un discours aussi libéré et décomplexé. Et je ne vous parle pas du chocolatier athée ! Ce qui m’a étonnée, c’est la quasi-absence de discours religieux. Elles parlent de liberté, d’indépendance, de vouloir échapper au monde et ses problèmes mais très peu de Dieu. Un aspect qui m’a presque choquée tant je le trouve surprenant voire incongru. En tout, si ce documentaire est passé largement inaperçu, il ne laisse pas indifférent et mérite largement d’être vu tant il bouscule les clichés. Sautez dessus si vous en avez l’occasion, il m’a fait passer un très bon moment.
Drame polonais de Pawel Pawlikowski avec Agata Trzebuchowska, Agata Kulesza, Dawid Ogrodnik
Dans les années 60, en Pologne, une jeune femme qui a grandi dans un couvent s’apprête à prononcer ses vœux. Avant la date fatidique de son entrée dans les ordres, la Mère supérieure lui demande d’aller voir sa tante qui est sa seule famille et n’a jamais souhaité la rencontrer. Ensemble, elles vont partir à la recherche de leur passé.
Dès les premières images, Ida a de quoi surprendre. Le film est dans un format carré, en noir et blanc, avec un très joli grain. Une esthétique qui nous plonge immédiatement dans l’époque et l’atmosphère un rien austère de ce film. Le sujet me faisait un peu peur, n’étant pas très portée sur la religion. Pourtant, j’ai vite été happée par la grâce de ce film si particulier. La religion est finalement en simple toile de fond et se sont l’identité et la mémoire qui constituent le vif du sujet. Des thèmes traités avec une grande justesse et qui montrent un visage de la Pologne dont j’ignorais à peu près tout.
En effet, en allant à la rencontre de sa tante, Ida renoue avec ses origines liés à des épisodes très sombre de l’Histoire. Le passé du pays et celui de sa famille s’entremêlent habilement, sans jamais devenir pesant. La relation entre les deux femmes évolue peu à peu, tout comme Ida, qui se perd autant qu’elle se retrouve dans cette quête de la vérité. Le scénario déjoue habilement les attentes et brosse un portrait touchant de ces femmes blessées. Un film beau et fort, d’une grande justesse : bouleversant.