C’est le début d’année et après le « Mercredi cuisine », j’inaugure un nouveau rendez : vous les 15 du mois, vous aurez droit à un morceau de culture occitane. Certes, ça ne va peut-être pas passionner les foules mais il se trouve que c’est ma langue maternelle au même titre que le français (oui, cette langue se transmet encore au sein de certaines familles, et non, être bilingue ne rend malheureusement pas toujours meilleur en langues…) et je baigne dans cette culture depuis le berceau. Culture millénaire à l’agonie, je me devais bien de lui faire une petite place par ici.

Commençons donc par le commencement, avec une rapide présentation de la langue. Une fois que vous aurez fait un peu connaissance, nous en viendrons à la culture ; chaque chose en son temps. L’occitan est une langue romane du Sud de la France. C’est une langue dialectale qui connaît donc de fortes variantes régionales. On compte six grands dialectes : Gascon, Languedocien, Provençal, Limousin, Auvergnat et Vivaro-alpin (il y a débat sur les subdivisions mais je ne m’étendrai pas sur la question et vous livre la plus communément admise). Souhaitant favoriser l’unification du pays et asseoir son pouvoir, la République française a, depuis la Révolution jusqu’aux années 50, mis en oeuvre des mesures drastiques pour faire disparaître les langues régionales qu’elle qualifiait de « patois ». Pour rappel, un patois est la déformation d’une langue ; l’occitan – tout comme le Basque, le Catalan, le Breton ou le Corse – est une langue à part entière, avec ses conjugaisons, sa grammaire et son vocabulaire propres – que les septiques essaient de comprendre un limousin et on en reparlera !

La langue apparaît au X° dans des textes officiels, pour se fixer dans sa forme classique au XII° s. Elle est alors parlée dans quasiment toute la partie Sud de l’actuel territoire français, exceptions faites du Pays Basque et de la Catalogne, qui possèdent leur propre idiome. On la pratique également dans certaines vallées alpines d’Italie et en Espagne, dans le Val d’Aran, où elle est aujourd’hui langue co-officielle. On appelle ce territoire linguistique le Pays d’Oc. Il est au XII° s. quasiment autonome – bien qu’il ne soit pas unifié – et très prospère. Le français ne s’implantera en terres occitanes qu’au moment de la Révolution, où il deviendra obligatoire pour les textes officiels. Ce n’est que bien plus tard que le peuple suivra le mouvement (contraint et forcé). Le déclin de la langue s’amorcera avec la Première Guerre Mondiale, bien qu’elle reste toutefois très fortement ancrée. C’est l’école qui sera le plus fort vecteur du développement du français ; les langues régionales y ont en effet été pendant longtemps durement réprimées. L’occitan restera toutefois la langue majoritaire jusque dans les années 60, en particulier dans les classes populaires ou les zones rurales.

Si la langue est depuis quelques décennies en fort recul, un regain d’intérêt se crée toutefois depuis quelques années, avec une véritable prise de conscience autour de la préservation du patrimoine culturel. En effet, en plus de mille ans d’existence, la langue véhicule aussi une culture qui lui est propre : celle des comtes de Toulouse, des troubadours, des Cathares et du Félibrige. Elle aura vu naître une religion qui a fait trembler le Vatican, aura été la langue de l’amour courtois et aura donné à la France l’un de ses premiers prix Nobel de littérature. Mais langue orale avant tout, elle aura surtout fait naître nombre de contes et légendes qui risquent fort de disparaître avec elle. Une fois par mois, je partagerai donc avec vous les histoires réelles ou imaginaires qui m’ont fait grandir.

J’aime beaucoup cette idée et je viendrais lire tes articles avec plaisir.
Super ! Voilà une très bonne nouvelle, merci ! 🙂
Mon compagnon, d’origine béarnaise, prend des cours d’occitan depuis la rentrée. Ses grands-parents parlaient occitan entre eux mais jamais avec lui, dommage….
Les gens de cette génération étaient habitués à ce qu’on dénigre leur langue et souvent ne l’ont pas transmise ; mais heureusement, il y a des gens qui y reviennent quand même 🙂
Bravo pour cet article bien documenté. La culture c’est aussi la connaissance de notre territoire et des langues de France. Elles font partie de notre identité, nous nous devons de ne pas faire comme si elles n’existaient pas, elles sont notre histoire.
C’est parce que j’ai eu un bon professeur !
Quel plaisir de lire un article sur l’occitanie. Chaque 15 du mois, je serai là !
Catalan pratiquant, je comprends ton combat. J’ai quelques amis défenseurs des langues régionales et un notamment qui défend l’Occitanie et tout ce que cela implique. Je trouve que c’est un beau combat. D’ailleurs, je fais mon mémoire universitaire sur la littérature comparée (catalan/français).
J’arrête de m’emballer mais je suis fan !
Beau sujet de mémoire ! Ca fait plaisir de voir qu’on est pas seul !
Et les troubadours, je les étudie en long, en large et en travers !
En février, je devrais parler d’eux justement 🙂
J’ai hâte. J’ai plein de cours et de livres sur eux. Mon professeur de littérature médiévale est spécialiste des troubadours…
Je suis malheureusement très loin d’être une spécialiste… M’étant spécialisé en littérature contemporaine (études d’édition obligent), je n’ai jamais eu le moindre cours de littérature médiévale à la fac. C’est bien dommage ! Mais je vais me pencher sérieusement sur la question.
J’aime beaucoup l’idée de ce rendez-vous. Je suis née en langue d’oil, mais depuis toute petite mes vacances se sont déroulées dans la région de Carcassone, et c’est là-bas que je me sens réellement chez moi. Je regrette tellement de ne pas parler l’occitan ! J’ai bien un petit livre pour apprendre, mais sans professeur ça n’est pas évident de se lancer.
Je suivrais tes futurs billets avec attention !
Pas toujours facile tout seul en effet, mais ça fait sacrément plaisir de voir que ça intéresse tant de monde ! 🙂
Ravie de voir qu’une nouvelle partie de toi fait jour sur ce blog !
Je vais tenter de suivre avec attention car malheureusement je ne parle pour ma part pas même deux mots « exotiques » de patois… Tout s’est perdu tellement vite, en 3 générations seulement dans ma famille ! C’est aujourd’hui un rêve lointain de connaître le provençal…
Oui, dans la plupart des familles ça s’est perdu avec la génération précédente, c’est bien dommage !
« Essayer de comprendre un Limousin ! » Ca sent le vécu ! Bon ok moi je triche, je parle occitan limousin 😉
Ahah ! Je suppose qu’un limousin qui va faire un tour en Gascogne doit avoir le même genre de problèmes 😉
oui oui tout à fait ! Les occitans d’Italie sont plus facile à comprendre pour moi que ceux de Bordeaux !!! (mais j’y arrive quand même)
Etrangement, je trouve aussi que l’occitan d’Italie est assez facile à comprendre, sans doute parce qu’ils ne mangent pas trop les mots, ça aide ! Ca fait plaisir de pouvoir parler problèmes de compréhension inter-régionale, c’est rare ! 🙂