Daddy Love, de Joyce Carol Oates
Robbie a cinq ans quand il est enlevé sur le parking d’un centre commercial sous les yeux de sa mère. Un long calvaire va commencer pour lui auprès de son ravisseur. Adapte des petits enfants, celui-ci se fait appeler Daddy love.
Si j’entends parler de cette auteur depuis longtemps, j’ai découvert Joyce Carol Oates sur le tard, avec son roman paru cette été, Carthage, que j’avais beaucoup aimé. J’ai donc été ravie d’apprendre qu’elle en sortait un nouveau (elle publie à un rythme effréné d’environ 2 romans par an !) et je me suis jetée dessus. Ca parle cette fois aussi d’enlèvement d’enfant. Mais sur un tout autre ton. Si on suit un peu la famille, c’est surtout sur l’enfant et les sévisses qu’il subit qu’est centré le texte. Autant vous dire que c’est très sombre et difficile comme roman, malgré un style fluide et agréable. C’est pourtant très prenant, on ne peut s’empêcher de vouloir savoir jusqu’où ça va aller et comment ça va finir. La fin justement m’a beaucoup surprise. Elle m’a mise très très mal à l’aise et je n’ai absolument pas su quoi en penser. Il y avait longtemps que je n’avais pas été aussi bloquée sur le sens à donner à un roman – c’est d’ailleurs bien le but ! Et si c’est très frustrant, c’est aussi agréable de tomber sur un texte d’une telle maîtrise ! J’ai adoré ce roman au sujet difficile qui se lit comme un thriller. Ames sensibles s’abstenir.
Elle n’avait pas cessé d’espérer – naturellement. Les désespérés ne cessent pas d’espérer, c’est une preuve de leur désespoir.
L’envers de l’espoir, de Mechtild Borrmann
Matthias Lessmann doit faire un choix difficile quand une jeune fille atterrit un matin d’hiver devant sa ferme. Doit-il la recueillir ? Pendant ce temps, dans la zone interdite de Tchernobyl, Valentina attend le retour de sa fille qui a disparu.
Je dois avouer que le titre de ce roman ne m’inspirait pas des masses et au moment de commencer ma lecture je me suis demandée ce qui avait bien pu le pousser à le demander en service de presse. Je m’attendais à quelque chose d’assez mièvre et je n’étais pas franchement d’un enthousiasme débordant en attaquant ce roman, sur ma liseuse qui plus est. Finalement, j’ai été mauvaise langue parce que j’ai assez vite accroché. Dans l’ensemble le style est agréable, même s’il y a parfois quelques tournures un peu faciles, peut-être dues à la traduction. L’histoire est particulièrement prenante et j’ai vraiment dévoré ce livre qui met vite en place une certaine tension. Ce n’est qu’après l’avoir refermé que je me suis posé la question de la vraisemblance mais ça n’avait plus guère d’importance. Si certains personnages sont stéréotypés, tous sont attachants et on se prend à vouloir connaître leur histoire. Le contexte est intéressant et le côté historique et social du récit ajoute à son charme. Sans être un grand roman, il évoque avec une certaine légèreté des sujets assez lourds. Une lecture agréable et une bonne surprise.
Ces pauses qui la distraient, les ménage-t-elle dans le but d’arrondir les angles et les coins des vieilles images, pour leur donner une allure satisfaisante sur le papier ?
Le destin funeste de Michael Rockefeller, de Carl Hoffman
Le 21 novembre 1961. Michael C. Rockefeller disparaît lors d’une expédition en Nouvelle-Guinée néerlandaise. Son corps ne sera jamais retrouvé. S’est-il noyé ou a-t-il fini dévoré par les cannibales Asmat ? 50 ans après, les rumeurs continuent de courir et cette histoire de fasciner.
Ce livre est présenté comme un roman, pourtant j’ai beau tourner et retourner ça dans tous les sens, c’est à mes yeux une biographie. Romancée sans doute, mais une biographie tout de même. Ou en tout cas un témoignage sur une enquête en vue d’écrire ladite biographie, ce qui revient plus ou moins au même. Maiiis, il y a écrit « roman » sur la couverture et qui suis-je pour contredire l’auteur (où plus probablement l’éditeur qui se prémunit ainsi contre d’éventuelles poursuites de la famille Rockefeller) ? A vrai dire, mon article sur la non-fiction débordait déjà un peu et il me restait de la place alors finalement, ça m’arrangeait plutôt comme ça. Roman, enquête, témoignage, le tout saupoudré d’un peu d’anthropologie (d’anthropophagie aussi tant qu’on qu’y est) et d’histoire des civilisations : aucun doute, on ne s’ennuie pas dans ce livre ! Ca se dévore plus que ça ne se lit ! Au début, on fait quelques grimaces de dégoût devant les descriptions de cannibalisme, puis, on laisse peu à peu de côté ce que ça peut avoir de fascinant et de dérangeant à la fois pour comprendre un peu mieux l’histoire de ces sociétés si différentes des nôtres. C’est clairement ce que j’ai préféré dans ce livre. Cette évolution qu’on sent aussi bien dans le regard de l’auteur que dans le nôtre. Si on ne peut prétendre comprendre ses sociétés en quelques pages, au moins ressortons-nous de cette lecture époussetés de quelques-uns de nos clichés d’occidentaux. C’est déjà un premier pas vers l’autre que je ne m’attendais pas à trouver dans un livre sur le rejeton d’une des familles les plus riches des Etats-Unis. Plus qu’un roman sur la mort de Michael Rockefeller, une rencontre touchante avec la culture asmat. Une belle découverte.
Les histoires les plus fascinantes ne portent pas sur les gens qui entrent dans le moule mais sur ceux qui accomplissent des choses imprévisibles.
La grande panne, de Hadrien Klent
Une mine de graphite explose en Italie, avec des conséquences inattendues : le nuage s’enflamme au contact des lignes haute-tension. Le gouvernement français décide une coupure d’électricité et installe sa cellule de crise sur l’île de Sein. Voyage au cœur du pouvoir.
Le résumé de ce roman avait attisé ma curiosité pourtant, je n’étais pas sure du tout d’apprécier. Ce n’est pas le type d’histoire que je lis habituellement et j’avais peur de ne pas accrocher avec cette sorte de « politique fiction ». Durant les premières pages, ça m’a semblé mal parti. Le style est comment dire… très très particulier… J’ai bien cru que je n’y arriverai jamais. J’ai toutefois continué histoire de laisser une petite chance à ce roman et j’ai bien fait ! Passées les premières pages un peu étranges, je l’ai dévoré ! Bon, ça reste assez particulier, aussi bien du côté de l’histoire que du style, mais au moins ça a le mérite d’être original. Les chapitres sont courts et alternent entre plusieurs personnages hauts en couleurs. Ca rend la lecture assez facile. L’idée de départ est originale est plutôt bien menée. Mais ce qui fait la force de ce roman, c’est son écriture qui sort des sentiers battus, même si l’auteur se perd parfois en digressions qui traînent en longueur, il se dégage de l’ensemble une belle énergie. Le roman propose quelques réflexions intéressantes sur des sujets de société parmi lesquels l’écologie ou le pouvoir. Je ne suis pas absolument certaine d’avoir saisi où ce roman voulait en venir mais j’ai trouvé son petit côté anarchiste plutôt plaisant. Une « politique-fiction » au style agréable qui m’a un peu changée de mes lectures habituelles.
Le Joyce Carol Oates me fait furieusement envie ! Bon, j’en ai lu un il y a quelques jours alors je vais attendre avant de me replonger dans un de ses romans mais il est noté 🙂
Je n’ai pas lu grand chose d’elle mais le moins qu’on puisse dire c’est que ça ne laisse pas indifférent ! Un peu traumatisant comme thème mais c’est tellement bien écrit.